Ce samedi 29 septembre 2007
Fenêtre Ouverte...............sur Chantal Bietlot
Ou... "Impressions d'une spectatrice"
« Les tableaux qui chantent la musique »… Comment résister à un titre si prometteur ? Je suis donc présente ce soir du 29 septembre 2007, au vernissage de l’exposition d’œuvres de l’artiste Chantal Bietlot, toutes inspirées par des compositions musicales, classiques pour la plupart. Et, dès mon entrée à la Galerie du Dragon, c’est le choc, la fascination, l’éblouissement… Ces toiles d’un style abstrait très particulier, aux formes et couleurs somptueuses, m’interpellent sur-le-champ et j’entre sans hésiter dans cet univers onirique qui me semble familier, en lequel je crois reconnaître des parcelles de ce « domaine étrange » nécessaire à mon épanouissement, voire à ma survie. J’arpente à mon rythme les trois salles m’arrêtant plus longuement devant certains tableaux. Après seulement, je consulte la liste des œuvres, curieuse de savoir quels compositeurs ont inspiré à l’artiste celles que je préfère… Schumann et Berlioz ! A propos de ce dernier, nul étonnement, j’adore sa Symphonie fantastique ! Mais Schumann ? En fait, je le connais peu et sans doute est-il urgent de le découvrir ! Je me promets donc de l’écouter sans tarder. Mais ne convient-il pas d’interroger Chantal Bietlot sur sa façon de procéder ? Je suis d’autant plus sensible à cette correspondance musique - peinture que j’écris toujours mes nouvelles « en musique » et propose dès lors au lecteur de lire le texte en écoutant l’œuvre « accompagnatrice », histoire de renforcer le lien, d’affiner le message… Et mon choix ne se fait pas par hasard, je cherche parfois longtemps la musique adéquate…
J’ose engager la conversation avec l’artiste qui répond à mes questions en toute simplicité et avec sympathie : elle ne se contente pas de « peindre en musique »… Elle jette au préalable son dévolu sur un compositeur et lit, en premier lieu, sa biographie (ayant la chance d’avoir un mari musicologue, elle a accès à tous les documents désirés). Ensuite seulement, elle écoute les œuvres, et ce pendant plusieurs jours d’affilée, afin de bien s’imprégner de la musique et des sentiments que celle-ci révèle, l’éclairage offert par la biographie étant d’un grand secours. C’est pendant cette période – parfois bien longue - de « communion » avec le musicien que, les pièces du « puzzle » s’assemblant dans sa tête, des formes et des couleurs lui apparaissent, s’imposent à elle avec insistance… Commence alors la 3e phase : le travail « manuel » fait du jeu des pinceaux, en symbiose avec la musique et les émotions ressenties. Une expérience peut-être unique et prodigieusement intéressante ! Je me sens euphorique comme si j’avais reçu une « révélation » ! Je lui fais part de ma préférence pour les tableaux portant la griffe de Schumann et suis stupéfaite d’apprendre qu’il a souffert de troubles nerveux, a tenté de se suicider en se jetant dans le Rhin et est devenu fou à la fin de sa vie. Mais sans doute sa musique reflète-t-elle aussi ses moments heureux…
Je me promets de lire et écouter Schumann…
Impossible d’acheter une toile mais j’emporterai la « Monographie » de Chantal Bietlot, un album très original dont la couverture est une huile sur toile et qui contient, outre une trentaine de reproductions de peintures, des poèmes de Béatrice Libert. L’un de ceux-ci m’a accrochée : « Les mains nues / elle hésite à tresser ses vertiges / glisse un chagrin vert dans sa poche / et tombe à genoux / dans le feu de son rêve ». Merveilleux, n’est-ce pas ? Et que de découvertes en perspective ! Feuilleter ce bel ouvrage en écoutant Stravinsky, Wagner, Prokofieff, Mozart, Rachmaninov… sans oublier Berlioz, Schumann et Poulenc, ce dernier parfait inconnu pour moi et qui pourtant m'a « parlé » puisque la page de couverture ayant guidé mon choix (j’ai longtemps hésité entre plusieurs) est le reflet de son « concerto champêtre » ! Peintres, musiciens, poètes, la solitude est certes nécessaire à la création, mais la tour d’ivoire est à délaisser parfois au profit d’une alliance, d’un partage et d’une célébration commune du mystère du monde…
Laurence Amaury